« Au lion d’or » mais pas le chat de la mère Michelle
Un jour à la maison, nous entendîmes des insultent puis des cris
perçants venant de chez la mère Michelle. Ces cris étranges ressemblaient à
ceux d’un enfant. Ma mère, qui était seule à la maison avec moi, fut pris de
panique et se précipita chez la voisine : elle devait craindre que quelque
drame était en train de se dérouler. Le fait est que les disputes de ce couple
étaient fréquentes et que cela se terminait souvent en pugilat. Oui,
quelquefois, les coups pleuvaient derrière la porte d’à coté, mais cela n’avait
jamais eu de conséquences notables sur ces deux carcasses robustes et avinées.
Cette fois, les cris avaient été d’une intensité et d’une brièveté des plus
inquiétantes. La mère Michelle nous avait ouvert sa porte et avait déclarer que
c’était de la faute de son satané chat. Et oui, comme dans la chanson
populaire, la mère Michelle avait un chat. C’était un affreux greffier de
gouttière de couleur gris sale qui passait son temps sur les toits
environnants, et ne revenait chez la mère Michelle que pour boire son lait et
manger les morceaux de mou qu’elle lui donnait. Elle expliqua que quand Minou
était en chasse (je ne compris ce terme que beaucoup plus tard), il devenait
très agressif, griffait avec sauvagerie, qu’il hurlait sur les toits voisins
toute la nuit et qu’il devenait difficile de dormir dans ces conditions. Il
avait griffé sérieusement son bras, mais elle savait comment agir dans ces cas
là. Elle nous montra la bassine remplie d’eau glacée qu’elle utilisait, et elle
nous mima les gestes à faire : elle le saisissait prestement par la peau
du coup puis elle trempai prestement l’arrière train de l’animal dans l’eau. Il
fallait le maintenir deux ou trois minutes dans cette position. Elle insista
plusieurs fois qu’il ne fallait pas tenir compte de ces cris ni de son attitude
menaçante, et l’eau devait vraiment être glacée. Elle conclut par ses
mots : « avec ce salopard de Minou, pour le calmer, il faut ce qu’il
faut ».
A chaque fois, l’animal blessé dans son amour propre, s’enfuyait
prestement par la fenêtre que la mère Michelle laissait ouverte. Quoiqu’il en
soit, il valait mieux qu’il s’enfuie qu’il se venge en détruisant les rideaux
punaisés sur les « modules de rangement » de la mère Michelle. Après
chaque séance de bain forcé, il disparaissait et ne revenait qu’après une
semaine de vagabondage.